jeudi 26 mars 2015

Le mur de Berlin commémoré dans l’espace urbain

Niederkichner Strasse un segment original du Mur entre l’ancien ministère de l’air du Reich et les fondations excavées des bâtiments de la Gestapo, des Services de Renseignement  et de la centrale S.S. offre une stratification de la complexité de l’histoire berlinoise et allemande du vingtième siècle.

 Outre le mémorial de la Bernauer strasse, les murs d’extérieur et d’arrière plan du mur de Berlin trouvent différents mémoriaux dans la ville, présentant des vestiges ou des créations commémoratives. L’espace urbain présente ainsi la mémoire du mur par plusieurs dispositifs.

Sur une grande partie de l’ancien tracé (160 kilomètres sur 167,8 kilomètres de mur), l’Etat allemand a financé un marquage de l’emplacement du mur, par une double bande pavée complétée de plaques de bronze gravées de l’inscription « Berliner mauer 1961-1989 » (mur de Berlin). Des panneaux informatifs et commémoratifs, ainsi que des photographies apportent une documentation à ce dispositif, à travers un parcours historique en 30 étapes. Bien sûr, nous pouvons aussi voir des restes du mur, comme à Leipziger Platz, dans le cimetière de l’Invalidenfriedhof ou dans des rues telles que Mühlen Strasse, Stresemann Strasse ou encore Niederkichnerstrasse, où sévissait la politique nazie.

Dans le Mauer Park (parc du mur), une portion particulièrement large et haute du mur a été conservée sur 300 mètres. Ce mur d’arrière plan servait à bloquer le public nombreux du stade Friedrich Ludwig Jahn. L’East side gallery, plus long tronçon continu conservé du mur (1,3 kilomètres) s’est transformée en exposition d’art par l’intervention d’artistes venus de 21 pays différents.
Nous pensons aussi aux anciens postes-frontières entre Berlin est et ouest ainsi qu’à la gare de transit de Friederichstrasse. Si Checkpoint Charlie, ancien point de passage du secteur américain de la ville, est resté le plus célèbre, les 6 autres postes sont symbolisés par des œuvres d’art, installées entre 1997 et 1999. À ces vestiges et installations s’ajoutent des dispositifs à la mémoire des victimes du mur, à l’image des lieux en l’honneur de Günter Litfin et Peter Fechter, respectivement abattus par les gardes-frontières en 1961 et 1962 lors d’une tentative de fuite vers l’ouest.

 Sarah Raisin-Dadre

La Bernauer Strasse, lieu de commémoration de la division allemande



Le mur de Berlin, mis en mémoire de plusieurs façons dans la ville, trouve dans le mémorial de la Bernauer Strasse (rue de Bernau) une mise en valeur particulière. Nous pouvons y voir sur 22 mètres le dernier tronçon entier, comprenant les parties ouest et est du mur, le « no man’s land » entre les deux ainsi que les poteaux d’éclairage, le chemin de ronde et la clôture. Autour de ces vestiges a été inauguré en 1998 un monument en acier Corten (aspect corrodé très marqué) qui ajoute des murs au mur. Une exposition en plein-air complète le lieu, le long d’un parcours de 1,3 kilomètres qui alterne vestiges du mur originaux ou reconstitués et panneaux textuels et visuels associés à des témoignages oraux.
De loin, le visiteur peut apercevoir des photographies reproduites sur les façades, montrant des évènements associés à des dates. La chapelle de la réconciliation se trouve également sur ce parcours. Elle a été construite à l’ancien emplacement du temple de la réconciliation, qui, détruit en 1985 par le régime communiste pour faire place nette, fut le symbole de la frontière car rendu inaccessible par le mur. La « Fenêtre du souvenir », rend hommage aux victimes du mur par des photographies sur support en acier Corten. Les vestiges et installations extérieures trouvent un complément dans les centres d’accueil et de documentation, qui accueillent et informent les visiteurs et proposent des expositions dans deux bâtiments distincts.
Si la conservation de morceaux du mur a fait polémique en 1989, son intérêt paraît aujourd’hui évident. La commémoration par les vestiges, complétée par des dispositifs originaux retraçant l’histoire, permet d’appréhender la mémoire du lieu. La Bernauer Strasse fut en effet le théâtre d’une destruction de l’espace urbain et de la séparation de familles et d’amis par la construction du mur en 1961, au milieu de la rue. Le site accueille des évènements, tels la cérémonie de commémoration du cinquantième anniversaire de la construction du mur, le 13 août 2011.

 Sarah Raisin - Dadre

Le mur de Berlin : une frontière entre monumentalisation et contrefaçon



    Au détour d’une rue, d’un immeuble, il est là, indissociable des paysages berlinois. S’élevant par petits fragments, le mur est le rappel d’un passé pesant, encore présent pour les allemands.

En 1989, ce ruban de béton s’étendait sur une centaine de kilomètres. Aujourd’hui le mur de Berlin est mis en valeur dans plusieurs lieux. A la Bernauer Strasse, on peut y voir une reconstitution minimaliste du mur et de l’ensemble des dispositifs défensifs. A la Topographie des Terrors, il s’élève devant le bâtiment moderne devenant le symbole du pouvoir autoritaire. Au Deutsches historisches museum, il devient objet de musée. Il est intégré à la muséographie comme témoin de l’histoire de l’Allemagne. Et puis, s’étendant sur plus d’un kilomètre le long de la Spree, on trouve l’East Side Gallery. Le mur devient monument protégé, un espace de commémoration à par entière. Musée à ciel ouvert, les artistes s’y succèdent. Le mur devient alors leur toile d’expression. Leurs œuvres dénoncent l’oppression et prônent la tolérance et la liberté.
Dans chacun de ces lieux, le mur est modelé, mis en valeur de manière différente afin de faire passer des messages différents.

Mais les touristes veulent aussi s’approprier une part de cette histoire en ramenant un morceau de mur dans leurs bagages. Élevé au rang de relique, les morceaux de mur sont présents dans toutes les boutiques touristiques. Pour maximum 45 euro, vous pouvez ramener un bout d’histoire.
Mais vrais ou faux fragments ? En effet, ne faisant pas exception au monde de la culture et de l’art, le mur est aussi sujet à de nombreuses contrefaçons. Un spécialiste allemand en géologie, Ralf Milke, les dénonce. Grâce à la composition du béton, il est capable de différencier les vrais des faux.

Ainsi on voit que le mur subit différents traitements par la société : muséification, monumentalisation, commercialisation ou encore falsification. 
 Manon Nicot